Romans

« Terrible vertu » d’Ellen Feldman

emilie Un avis de Saiwhisper

Titre : « Terrible vertu »
Auteur : Ellen Feldman
Genre : Biographie
Éditeur : Le Cherche Midi

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résumé du livre

Portrait d’une des figures les plus influentes et les plus controversées du XXe siècle, ce roman met en scène cette femme indomptable. Élevée dans un milieu pauvre, par une mère épuisée par treize grossesses, Margaret se fait très jeune le serment de ne jamais subir la vie d’une femme au foyer. Devenue infirmière à une époque où la contraception est illégale, elle décide de se consacrer aux femmes et met sur pied en 1916 la première clinique clandestine de contrôle des naissances. C’est le début d’une vie de luttes enfiévrées qui la conduiront à créer en 1952 le planning familial, avant de militer, par tous les moyens, pour la légalisation de la pilule. Son acharnement la conduira plusieurs fois en prison, elle sera contrainte de fuir les États-Unis pour l’Angleterre et la France, où, là encore, toujours aussi indomptable et provocante, elle poursuivra son inlassable combat pour l’égalité des sexes. Ellen Feldman nous restitue ici la vie d’une femme hors du commun, mais aussi de ses proches, mari, amants, enfants, famille, dont l’existence a souvent été malmenée par cette héroïne en quête d’absolu, qui a changé la vie de toutes les femmes, peut-être aux dépens de la sienne.

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Ma critique

Bien que je ne sois pas une adepte des biographies, même romancées comme c’est le cas ici, j’ai accepté sans hésiter de recevoir cet ouvrage dans le cadre d’une masse critique spécialisée. Les sujets de la contraception ainsi que de l’égalité de la Femme et de ses droits à cette époque m’intéressaient beaucoup. De plus, je ne connaissais absolument pas Margaret Sanger, cette révolutionnaire à la personnalité indomptable qui a tant fait pour faire avancer les mentalités et défendre les Femmes ! Je remercie donc Babelio et les éditions Cherche Midi pour cet envoi.

couv19217995« Terrible vertu » retrace la vie de Margaret Sanger qui, issue d’une famille nombreuse, refusa dès son adolescence de devenir mère au foyer. Rapidement, la belle américaine fit tout pour étudier et travailler sans dépendre d’un mari… Elle se rendit surtout rapidement compte que les conditions de la Femme étaient différentes de celles de l’Homme, quel que soit le domaine. Aussi, essaya-t-elle de renverser les codes de son époque. Et même si j’avais lu quelques œuvres féministes, j’ignorais que certaines choses se passaient de la sorte… Ainsi, j’ai beaucoup appris, comme le fait aberrant que le plaisir d’une femme était tabou. Il n’était pas convenable de faire du bruit ou de bouger pendant l’acte sexuel. On ne pouvait que contenter son mari en silence et en faisant son devoir conjugal pour enfanter. Il n’y avait aucune égalité sexuelle, certes, mais je n’imaginais pas que ce fut à ce point ! En ce qui concerne les premiers moyens de contraception, j’ai réalisé que je n’y connaissais rien : j’ignorais, par exemple, que seuls les hommes pouvaient acheter des préservatifs (qui étaient d’ailleurs très chers) et j’ai découvert ce qu’était un pessaire… Quelle époque ! En lisant cet ouvrage, on réalise que l’on revient vraiment  de loin grâce à des personnes comme Margaret !

Margaret Sanger va énormément se battre pour la justice sociale, aborder le droit de vote, l’égalité salariale, la santé des femmes ainsi que l’avortement. Des sujets faisant polémique et étant interdits ! D’ailleurs, la révolutionnaire va avoir énormément de problèmes avec la police et la justice… Heureusement, elle ne baissera jamais les bras, canalisant alors son énergie sur la légalisation de la contraception grâce à sa clinique illégale où elle va conseiller celles et ceux qui oseront braver l’interdit et les bonnes mœurs pour se préserver d’une vie difficile avec une dizaine d’enfants à charge… Ce combat est aussi intéressant qu’important ! Néanmoins, j’avoue ne pas avoir spécialement accroché au tempérament de la militante. Certes, elle est impressionnante, déterminée, charismatique et intelligente, toutefois elle a complètement négligé les siens, ce qui n’est pas dans ma nature… Je n’aurais pas pu faire de tels sacrifices, surtout vis-à-vis de mes enfants. L’américaine préférait avoir une vie sexuelle hyper active en couchant avec plusieurs hommes, bien qu’étant mariée, et a surtout délaissé ses trois bambins qu’elle ne voyait à peine… Même en les sachant dans une pension où les repas sont mauvais, où il n’y a pas d’eau chaude ou de chauffage et très peu d’école, elle n’a rien fait pour eux. Les pauvres ont grandi sans parents pour prendre soin d’eux. C’est à peine si elle les voit quand elle a le temps, entre deux réunions, ou lorsqu’elle n’est pas dans un autre pays… Sa dévotion et ses engagements féministes passent avant tout le reste ! Or, même si j’admire ce à quoi elle a dédié sa vie, je ne peux m’empêcher de songer que ce n’est pas ma vision des choses.

L’ouvrage fut intéressant. J’ai particulièrement aimé lorsque l’auteure a donné la parole à l’entourage de Margaret, comme son mari Bill, ses fils, son avocat ou d’autres personnes l’ayant côtoyée. On sent qu’Ellen Feldman a fait beaucoup de recherches et a longuement échangé avec les descendants de cette femme incroyable. Voilà une biographie romancée à découvrir si vous cherchez une lecture féministe, désirez en apprendre plus sur les début du planning familial ou souhaitez découvrir une personnalité ayant révolutionné son époque.

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Citations

Seule la femme rebelle, lorsqu’elle sort des usages que lui imposent les conventions bourgeoises, peut faire œuvre d’une terrible vertu.
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Avant nos épousailles à la sauvette, Bill et moi étions complètement d’accord sur la nature du mariage. C’était une institution bourgeoise étouffante, une forme de soumission légale qui transformait les femmes en biens mobiliers. Notre union serait faite d’un autre métal, d’une fusion entre êtres égaux fondée sur l’amour, le respect mutuel et la liberté totale. L’égalité des sexes était notre credo. Nous étions convaincus que les femmes aussi bien que les hommes avaient le droit et le devoir d’employer leur corps, ce don de Dieu, à vivre aussi pleinement que possible.
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J’ouvre les yeux. La chambre est bondée. Les femmes qui sont venues témoigner au tribunal, berçant des enfants sur leurs genoux, chargées de sacs de nourriture et de couches, huant le juge lorsqu’il a prononcé le verdict, se rassemblent autour du lit. Des clientes de la clinique les bousculent, les yeux écarquillés d’émerveillement, leur sourire éclairant un monde encore plongé dans les ténèbres de l’ignorance. Elles se pressent, me tendent les mains, poussent des clameurs. Merci, madame Sanger. Une sainte. M’avez sauvé la vie, m’dame Sanger.

Je les sens tournoyer autour de moi, donner des coups de pied en l’air, téméraires, libres. Elles secouent leur chevelure indomptable avec une joie tapageuse et ouvrent grand la bouche pour en laisser sortir les rires et les mots.
Nous aussi, nous sommes tes filles, clament-elles. Et tu nous as sauvées.
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Leurs insultes ne peuvent pas venir à bout de ce que j’ai accompli. J’ai changé le monde pour le mieux. Et cela, nul ne peut me l’enlever.
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Ma note

4/5

12 réflexions au sujet de « « Terrible vertu » d’Ellen Feldman »

  1. Je ne cherche pas vraiment de lecture féministe mais ton avis m’a donné envie de feuilleter ce bouquin même si, d’après tes dires, je risque moi-même ne pas trop apprécier le comportement de notre militante ^^; Enfin, on dit bien que personne n’est parfait, non ? 😉

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    1. Je suis ravie d’avoir su t’interpeler avec cette biographie romancée. ^^
      Oui, personne n’est parfait ! Et, comme m’ont dit certains, il faut ce genre de personnes pour faire avancer le monde… (Mais je suis rassurée de voir que je ne serais pas la seule à tiquer sur le comportement/choix de vie.^^)

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  2. C’est en effet une lecture qui a l’air d’être très intéressante. J’avoue être dans une période où je suis tellement lassée par la misogynie de la réalité (et de certaines lectures, contre toute attente!) que j’évite un maximum les bouquins qui parlent d’un passé machiste.
    Mais je me le garde en tête pour un moment où je serai d’attaque pour ce genre de lecture 😀

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  3. Je ne lis guère de biographies romancées étant perturbée par le fait de ne pas savoir démêler le vrai du faux, mais celle-ci présente de sacrés atouts si l’on considère les sujets abordés et les informations surprenantes/révoltantes que tu as découvertes en cours de lecture…
    Si la personnalité de cette militante heurte sensiblement mes valeurs qui se rapprochent bien plus des tiennes, je trouve intéressant que l’auteure évoque l’héroïsme de cette femme qui se bat pour ses idéaux sans pour autant gommer ses défauts.

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    1. Je comprends pour l’idée de vrai du faux… Après, de ce que j’ai vu sur les infos d’internet, l’auteure a été assez fidèle. Et je ne pense pas que le petit-fils de cette femme laisserait écrire n’importe quoi… Même si, effectivement, je pense qu’il y a une part de fiction, ne serait-ce que dans les dialogues.
      Je te rejoins sur l’intérêt de la militante dont les défauts ne sont pas gommés.

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