Un avis de Saiwhisper
Titre : « Le Roi des Hyènes »
Auteur : Tess Corsac
Genre : Fantastique / Littérature ado – young adult
Éditeur : Leha Editions
#ISBN9791097270643
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Dans les Confins, un monstre rôde. Dans ce territoire ceint d’un mur qui y enferme ses habitants, lorsque la nuit tombe, une harde de hyènes quitte le bois pour envahir les rues sans que personne ne se résolve à les abattre. Mais sont-elles le véritable danger ? Dans les Confins, chaque enfant est lié à un Machaon, un gardien coloré qui les protège jusqu’à l’âge adulte. Almire, quinze ans, a vu son Machaon lui être arraché. Depuis cette agression, une hyène de brume le pourchasse, tapie dans l’obscurité : ce démon veille à son silence. Ce secret, ignoré de tous, le ronge, jusqu’au jour où un groupe de jeunes l’approche. Tous partagent le même drame, et ils nourrissent une ambition commune : faire éclater la vérité. Faire tomber le monstre en habits d’homme. Almire sait qu’il ne retrouvera jamais son Machaon, mais il compte bien reconquérir son bonheur. Pour ça, il lui faut renverser le Roi des Hyènes. Coûte que coûte.
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Après avoir apprécié « Les Nocturnes », j’ai avidement guetté les avis sur « Le Roi des Hyènes ». Or, quand j’ai réalisé que Callysse et Amanda avaient eu un coup de cœur pour ce one-shot, je l’ai directement mis en wish list ! J’en ai finalement fait l’acquisition grâce à un swap avec Callysse que je remercie encore ! Comme il me tardait de découvrir les aventures d’Almire, je me suis vite planifié cette lecture prétendant au PLIB. Hélas, je pense que j’en attendais beaucoup trop… Certes, ce titre est bourré de qualités et d’originalité cependant, il m’a manqué quelque chose… Attention, j’ai quand même aimé cette lecture ! Elle a vraiment sa place pour aller loin dans la sélection du PLIB. Néanmoins, je désirais ressentir le même enthousiasme que celui des copines…
À mes yeux, la force de cet ouvrage réside dans son univers aussi riche qu’original. On est sur un monde similaire au nôtre, mais où les choses ont changé… En mal ! Il y a énormément d’insécurité, en particulier à cause de hyènes féroces qui ont envahi les Confins. Dès la tombée de la nuit, elles sortent pour traquer de jeunes proies. On distingue aussi beaucoup de non-dits et de mystères. Or, une poignée d’enfants se pose des questions sur cet univers dangereux. Ces jeunes ont tous un point commun : ils n’ont plus de Machaon. Les machaons m’ont rappelé les Daemons de la saga « À la croisée des mondes ». Comme eux, ils sont une créature protectrice liée à son propriétaire qui sert de prolongement de l’âme. Si on sépare un humain de son Machaon, le porteur peut sombrer dans la folie, le mal-être et le désespoir. Il a l’impression d’être « incomplet ».
J’ai adoré ce concept qui, si l’on fait bien attention, est bien plus complexe qu’on le pense ! Si un jeune lectorat n’y verra qu’une séparation de deux compagnons, l’œil adulte y lira un autre message. Ainsi, à travers l’idée de Machaons, on aborde les thèmes de l’adolescence, de la transition à l’âge adulte, du fait de grandir ainsi que des peurs ou des changements que cela implique. Lors de cette transition, on se sent vulnérable. C’est le cas d’Almire, le héros. Sans cette part de lui-même, un fragment de son enfance et de son innocence, il doit lutter pour avancer alors qu’une hyène nébuleuse et intérieure guette la moindre défaillance… Celle-ci représente nos propres craintes, nos idées noires, nos échecs. Voilà une chouette métaphore ! En plus des sujets cités, on pointera également du doigt les thématiques de l’entraide, des traumatismes, des secrets, du pardon, de la vengeance, de la reconstruction et de la résilience. J’ignore si c’est une interprétation personnelle ou non, mais on va aussi toucher à des éléments plus sensibles comme l’abus sexuel… En effet, il est dit que le roi des hyènes est un mangeur d’âme… autrement dit, un monstre volant l’innocence des adolescents. Ne parle-t-on pas de viol sur des mineurs ? (Pour le coup, il faudrait que je papote avec les copines ou que je sonde l’autrice pour voir si j’ai bien saisi ou si je fais fausse route…)
Comme dans le premier roman de Tess Corsac, les personnages sont nombreux et auront tous leur importance. Je reconnais qu’il m’a fallu un temps d’adaptation pour cerner tout le monde toutefois, tout le monde est bien dépeint et non stéréotypé. Dans un titre destiné à un public ado / young adult, c’est très appréciable ! En outre, que ce soit le héros, son entourage ou l’antagoniste, tous ne sont jamais insensibles à ce qu’ils traversent. Ils ressentent énormément d’émotions. Ils sont également imparfaits, terriblement humains et plein de nuances. Pourtant, je n’ai pas eu d’attache… J’en ignore la raison cependant, je suis restée en surface ! Cela m’a véritablement frustrée, car ces protagonistes avaient de nombreux atouts pour me charmer…
Un autre élément m’a troublée : le rythme. Ce point m’a totalement partagée. D’un côté, j’ai apprécié les chapitres courts et fluides qui comportent toujours de belles illustrations. Les pages se tournent aisément, car la plume de l’autrice est très agréable. Pourtant, à l’inverse de « Les Nocturnes », j’ai estimé qu’il n’y avait pas beaucoup d’action. On a surtout mis l’accent sur la psychologie, sur l’enquête pour deviner l’identité du Roi des hyènes et sur l’ambiance tendue. Ponctuellement, j’ai ressenti quelques longueurs. J’ai également eu la sensation de tourner en rond au point de mettre longtemps avant de voir où Tess Corsac désirait nous emmener. Hormis un affrontement évident avec l’antagoniste qui donne son nom au livre, je ne savais pas à quoi m’attendre… Après une mise en place longue, il m’a fallu attendre plus de la moitié du livre pour réellement apprécier la dynamique du récit. C’est sans doute dû au fait que tout va monter crescendo. L’attente est longue, mais elle vaut le coup !
Ce titre ne m’a pas laissé insensible et, même en l’ayant terminé, il a laissé son empreinte sur moi. J’ai encore des doutes, des fragments du scénario et des liens entre les personnages qui me viennent en mémoire… Bravo ! Honnêtement, ne vous fiez pas à mes ressentis en demi-teinte. C’est un bon roman avec plusieurs niveaux de lecture qui vaut le détour, ne serait-ce que pour son univers ou pour ses protagonistes fouillés.
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Tout est devenu limpide : y avait d’autres gens qui avaient peur du noir. D’autres enfants sans gardien, comme moi.
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Je le vois. Ce lambeau de brume, ce nuage trapu qui galope entre les broussailles, tapi dans mes angles morts. Le monstre brouillardeux est revenu. Rien d’étonnant : il fait sombre et j’ai trop peur. J’essaie de ne pas le regarder. Il faut que je me concentre sur les lumières du village, au sommet du coteau. Je dois oublier le nébuleux, il n’existe pas. C’est le fruit de mon imagination.
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Je me sens coupable d’un crime : j’ai ignoré la douleur d’autres enfants. Je n’ai pas réagi à leur détresse, alors que, pendant de longues années, j’ai espéré qu’on réponde à la mienne.
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Oh, j’imagine que mon avis et celui de Callysse ont dû générer des attentes assez élevées, ce qui n’est jamais bon :/. C’est toujours le risque lorsque l’on conseille un livre, et je suis déçue pour toi, même si ce sont des choses qui arrivent.
En ce qui concerne la métaphore d’abus sexuels, j’ai effectivement eu la même interprétation, et je pense qu’elle est correcte ;). Je trouvais justement que l’auteure avait un réel talent pour faire ressentir les choses, plutôt que de les nommer, ce qui fait tout l’intérêt du roman.
J’espère que le prochain titre de Tess Corsac t’emballera davantage, en tout cas :).
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J’avoue que j’attendais un coup de cœur. C’est mettre de la pression pour rien, mais j’avais tellement d’attentes ! >_< Le titre est très bien, en plus ! C'est ma faute, pas la votre ! ❤
Ah, tu me rassures pour les abus (et du coup, l'inceste pour l'un des persos…). Ce n'était donc pas une fabulation de ma part. Je te rejoins totalement sur le fait que Tess Corsac a vraiment bien su développer le sujet sans les nommer ! Une double lecture pertinent et bien gérée !
Merci ! Franchement, je guette ses prochains écrits.^^ Même si j'ai préféré les Nocturnes, le Roi des Hyènes marque et a beaucoup de qualités !
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Je suis désolée de t’avoir inconsciemment incitée à avoir des attentes trop hautes pour ce titre. Heureuse tout de même que tu ais trouvé du bon dans ce récit. Et je suis d’accord avec ton interprétation 😉
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Mais non, ne t’excuse pas ! J’ai aimé ce titre malgré mes attentes hautes. Et j’ai conversé avec l’autrice qui est adorable. Elle a confirmé l’interprétation.
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Malgré tes bémols, le roman me tente beaucoup, notamment avec cette métaphore introduite par le concept de machaons que tu explicites fort bien. J’aime les livres jeunesse avec un double niveau de lecture ! Et puis, pas très courant de trouver des hyènes dans un roman…
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Honnêtement, ça vaut vraiment le détour ce double niveau de lecture ! Oui, c’est rarissime pour les hyènes !
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