Romans

« Mille petits riens » de Jodi Picoult

emilie Un avis de Saiwhisper

Titre : « Mille petits riens »
Auteur : Jodi Picoult
Genre : Roman contemporain
Éditeur : Actes Sud / Babel

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résumé du livre

Ruth Jefferson est sage-femme depuis plus de vingt ans. C’est une employée modèle. Une collègue accommodante. C’est aussi la seule afro-américaine de son service. Le jour où un couple de suprémacistes blancs demande à ce qu’on lui interdise tout contact avec leur bébé, Ruth est choquée de voir sa hiérarchie accéder à leur requête. Quand le nourrisson décède quelques jours plus tard, c’est elle qui est pointée du doigt. Accusée de meurtre, Ruth va devoir répondre de ses actes devant la justice. Mais sa couleur de peau ne la condamne-t-elle pas d’avance ?

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Ma critique

Petite pépite émotionnelle, « Mille petits riens » est un roman contemporain que j’ai connu grâce à Bountynette et plusieurs lecteurs de la médiathèque, mais que je n’avais pas lu avant qu’il ne soit proposé au club des lecteurs ! C’est à présent chose faite. Comme je m’y attendais, ce que va traverser Ruth, une sage-femme noire accusée d’homicide contre le bébé d’un couple de suprématistes blancs, m’a bouleversée. J’ai été touchée par son combat quotidien, que vivent malheureusement de nombreuses personnes de couleur aujourd’hui encore… couv4116791Mais également par son arrestation ainsi que son procès. On a terriblement envie de se battre à ses côtés ! Je ne pense pas que l’on puisse rester insensible à toutes les injustices qu’elle va traverser. C’est tellement dur, révoltant, angoissant et énervant ! Le pire, c’est que le récit est inspiré d’un fait réel !

Construit sur une narration à trois voix, l’ouvrage met en lumière des protagonistes que tout oppose. On a bien évidemment Ruth, cette femme travailleuse, compréhensive, douce, franche et dévouée à son emploi depuis plus de vingt ans. Loin d’être parfaite, il lui arrivera de faire des erreurs, en particulier vers la moitié du livre ! Sa personnalité m’a émue et m’a rappelé le caractère d’un personnage de « La couleur des sentiments ». L’auteure a opté pour une narration originale et pertinente : celle de Turk, le père skinhead qui va porter plainte contre Ruth. J’ai trouvé très intéressant le fait d’avoir son point de vue et de comprendre comment il a plongé dans cette haine … En revanche, les passages le concernant sont très difficiles, extrêmes et violents. En effet, Turk n’hésite pas à « casser la gueule à un couple de lopettes », à cracher sur des « nègres » ou à tirer au fusil sur des silhouettes en forme de « youpins ». Ce protagoniste est évidemment très raciste et homophobe. Il emploie ce genre de propos méprisables qui ne devraient pas laisser le lecteur de marbre. Pour ma part, j’ai eu beaucoup de mal avec son caractère, car je n’ai pas du tout cette mentalité… Toutefois, je trouvais que Jodi Picoult avait eu une bonne idée en lui donnant la parole et lui a offert de la consistance. Il est plus complexe qu’il n’y parait ! J’ai également apprécié le fait que, d’après les remerciements, elle avait interrogé plusieurs anciens skinhead afin d’apporter de la crédibilité à l’histoire de Turk. La troisième personnalité est Kennedy, une avocate blanche qui va prendre parti pour la sage-femme et qui va ouvrir les yeux sur le quotidien des personnes de couleur et sur la société en général. Elle forme un assez bon duo avec sa cliente.

L’histoire prend le temps de se mettre en place. Sans doute un peu trop cependant, cela dépendra du ressenti de chacun. J’ai aimé le fait que Ruth nous décrive son quotidien ainsi que plusieurs accouchements. Certains passages, comme l’anecdote du bébé défiguré, sont tellement poignants ! Dans ma tête, je me suis revue six mois en arrière, songeant aux adorables sages-femmes et infirmières qui avaient été là pour m’aider lors du travail de mon premier enfant et durant le séjour à la maternité. Je voyais en Ruth certaines de ces femmes : leurs petits gestes pour effacer la douleur, leur délicatesse avec mon nourrisson, leur écoute à n’importe quel moment, leur soutien aussi bien pour moi que pour le père, etc. Ruth m’a donc semblé parfaitement crédible dans son rôle. L’arrivée du couple Turk / Brittany va évidemment tout chambouler et, aussitôt, ce sera la descente aux enfers ! Les événements vont s’enchaîner à toute allure durant une centaine de pages, ne laissant au lecteur que son indignation et son émoi comme seul souffle. Puis, les choses vont malheureusement stagner et se répéter… Je ne peux pas parler d’ennui néanmoins, j’ai clairement estimé que l’on aurait pu raccourcir certains chapitres. En revanche, toutes les pages du procès final sont très intéressantes ! Mon regret sera, hélas, le twist permettant de conclure l’affaire : je l’ai trouvé trop facile, peu crédible et inattendu… Cela faisait très rebondissement américain de dernière minute ! Heureusement, l’ensemble du roman ainsi que son épilogue auront réussi à me séduire. Je recommande cet ouvrage à ceux qui cherchent un récit touchant avec des thématiques actuelles intéressantes.

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clubdeslecteurs

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Citations

Je voulais qu’elle voie de ses propres yeux que l’amour ne dépend absolument pas de ce qu’on regarde, mais entièrement de la personne qui regarde.
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La fierté est un dragon féroce : elle somnole dans le fond de votre cœur puis se met à rugir quand vous n’aspirez qu’au silence.
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La réalité me percute aussi violemment qu’un coup de poing : ce n’est pas ce que j’ai fait qui les dérange.
C’est ce que je suis.
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Ils m’ont menottée. Ils m’ont attaché les poignets, juste comme ça, comme si ce geste ne réveillait pas deux siècles d’histoire qui se sont aussitôt répandus dans mes veines avec la force d’une décharge électrique. Sans penser un instant que je ressentirais ce qu’ont ressenti mon arrière-arrière-grand-mère et sa mère, debout sur l’estrade pendant la vente aux enchères des esclaves.
Ils m’ont menottée sous les yeux de mon fils, mon fils à qui je dis et je répète depuis le jour de sa naissance qu’il est bien plus qu’une couleur de peau. 

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Ma note

 4,5/5

20 réflexions au sujet de « « Mille petits riens » de Jodi Picoult »

  1. Ce genre d’histoire doit en effet indigner au plus haut point!
    Je ne sais pas si j’ai envie d’être dans la tête d’un néo nazi par contre, on entend déjà un peu trop leur rhétorique en ce moment pour qu’une plongée dans leur tête m’intéresse.
    Mais je comprend le choix et je note ce livre pour plus tard, en espérant que le twist final me gêne moins 🙂

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    1. Oui, on s’indigne et on ne reste pas insensible.
      Il est vrai que l’on entend déjà leur rhétorique, mais je pense que dans ce livre, c’était nécessaire pour suivre l’évolution de ce personnage. D’autant que, comme le dit l’héroïne, un bébé nait « vierge/neutre/blanc » de tout. C’est sa famille qui le construit et lui inculque des idées…
      Je te le souhaite. ❤

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  2. Dommage pour la fin, mais l’ouvrage semble t’avoir marquée et émue. Bien que les passages le concernant doivent être insupportables, je trouve intéressant que l’autrice nous fasse partager la point de vue d’un protagoniste qu’on ne peut que détester. Quant au fait que ce soit tiré d’un fait réel, cela rend l’histoire encore plus révoltante…

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  3. Malgré ton bémol final, le roman me tente beaucoup. Je l’ai souvent vu passer avec de jolis commentaires et la couverture me parle. Je le mettrais un peu à côté de La couleur des sentiments dont j’avais adoré l’adaptation ciné 🙂

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  4. Oh oui ! Voilà un livre qui ne doit pas laisser indifférent ! Et faire passer le lecteur par toutes sortes d’émotions ! Inspiré d’une histoire vraie, en plus. La couverture n’étant pas très chouette, selon moi, je vais voir si je peux me le procurer en ebook, à un prix raisonnable… merci infiniment pour ta chronique 😘🌹

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    1. Exactement ! ❤ Tu as bien cerné cette petite pépite émotionnelle !
      Oui, je suis d'accord pour la couverture. Surtout que l'héroïne est plus âgée que cette fillette et cela ne correspond à personne du côté des personnages….

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  5. Ce live a tellement été un claque pour moi ! Effectuvement la fin est un peu dommage, même si perso j’avais tellement à penser que ça m’a pas non plus dérangé. J’ai bcp aimé le personnage de Kennedy, et la façon dont elle va se rendre compte que le racisme est au final partout, et pour ça pas besoin d’être néo-nazi comme Turk !

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