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« Ce que tu as fait de moi » de Karine Giebel

emilie Un avis de Saiwhisper

Titre : « Ce que tu as fait de moi »
Auteur : Karine Giebel
Genre : Thriller psychologique / Romance
Éditeur : Belfond

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résumé du livre

Personne n’est assez fort pour la vivre. Personne n’est préparé à l’affronter, même si chacun la désire plus que tout. La passion, la vraie… Extrême. Sans limites. Sans règles. On se croit solide et fort, on se croit à l’abri. On suit un chemin jalonné de repères, pavé de souvenirs et de projets. On aperçoit bien le ravin sans fond qui borde notre route, mais on pourrait jurer que jamais on n’y tombera. Pourtant, il suffit d’un seul faux pas. Et c’est l’interminable chute. Aujourd’hui encore, je suis incapable d’expliquer ce qui est arrivé. Si seulement j’avais plongé seul…
Cette nuit, c’est le patron des Stups, le commandant Richard Ménainville, qui doit confesser son addiction et répondre de ses actes dans une salle d’interrogatoire. Que s’est-il réellement passé entre lui et son lieutenant Laëtitia Graminsky ? Comment un coup de foudre a-t-il pu déclencher une telle tragédie ?
Si nous résistons à cette passion, elle nous achèvera l’un après l’autre, sans aucune pitié.
Interrogée au même moment dans la salle voisine, Laëtitia se livre. Elle dira tout de ce qu’elle a vécu avec cet homme. Leurs versions des faits seront-elles identiques ?
Si nous ne cédons pas à cette passion, elle fera de nous des ombres gelées d’effroi et de solitude. Si nous avons peur des flammes, nous succomberons à un hiver sans fin.
La passion selon Karine Giebel… conduit forcément à l’irréparable.

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Ma critique

Deuxième rencontre avec Karine Giebel avec, cette fois-ci, une nouveauté controversée : « Ce que tu as fait de moi ». Dès les premières pages, ce thriller psychologique a réussi à m’interpeler avec son système narratif efficace, consistant à débuter par la fin en donnant la parole aux deux personnages principaux de façon simultanée. Ces derniers sont dans une salle d’interrogatoire, séparés, à vif et perturbés par ce qu’ils ont vécu. Chacun narre sa vérité, ses ressentis sur le moment et son point de vue en général. C’est original, noir, addictif et fluide ! De plus, cela permet de cerner chaque personnage. Or, le lecteur sait qu’un drame s’est passé, mais il lui faudra affronter l’horreur pour comprendre et parvenir à assembler chaque pièce du puzzle. Dans notre quête de la vérité, nous allons ressentir une pluie d’émotions contradictoires : dégoût, agacement, colère, peine ainsi qu’une curieuse envie malsaine de connaître la suite. Ce côté glauque mais saisissant fait réellement la force de ce titre et, à vrai dire, c’est sans doute ce qui m’a le plus effrayé. Violence, viol, chantage, manipulation, excès, folie, harcèlement, passion dévorante, adultère, … Les thématiques sont aussi sombres que vastes ! Le contenu écœure, révolte et donne envie de hurler ! Ce n’est clairement pas à mettre entre toutes les mains… Emprunte d’un voyeurisme dérangeant, j’avais pourtant envie de tourner les pages afin de savoir où la relation entre Richard et Laëtitia allait les mener. Terrifiant !

couv11571351De façon étrangement synchronique, comme s’ils étaient connectés, les deux policiers vont donc retracer leur quotidien au cours des derniers mois : leur rencontre, l’étincelle qui les a irrémédiablement reliés, les premières missions ayant tourné au vinaigre, puis la descente aux Enfers. L’auteure est toujours aussi talentueuse dès qu’il est question de développer la psychologie de ses personnages. J’ai d’ailleurs beaucoup aimé son travail autour du bien et du mal. Entre victime et bourreau, il n’y a qu’un pas. Car, même si Laëtitia ne mérite absolument pas ce qu’elle a traversé au début du livre, elle est loin d’être innocente. Systématiquement, j’ai eu l’impression qu’elle optait pour les mauvaises décisions, ne réfléchissait pas et courrait droit vers le danger ! Son comportement changeant m’a irritée plus d’une fois. Ainsi, je ne pouvais m’empêcher de jurer durant ma lecture… Richard est également un protagoniste complexe, percutant, impulsif, détestable et marquant. J’avais réellement du mal à le cerner. Plus il s’embourbait dans cette relation toxique et révoltante, plus je peinais à le comprendre. Deux fous. Deux individus calculateurs oscillant entre attirance, haine et amour. Deux personnalités démentes qui se livrent à une lutte passionnelle, déchirante et violente. Je crois n’avoir jamais autant ressenti de choses pour deux personnages de fiction auxquels j’ai été incapable de m’attacher. Mais ce duo avait quelque chose d’unique : il a été capable de ne pas me laisser insensible et de me perturber. Les personnages secondaires sont peu nombreux toutefois, Fougerolles (un collègue bon orateur et assez pousse au crime) et Amaury (le compagnon très naïf de Laëtitia) sont l’un des individus les plus marquants et ayant les rôles les plus décisifs.

J’ai découvert cette spirale noire en lecture commune avec Siabelle et Sylviedoc que je remercie pour leurs nombreux échanges. Nous avons trouvé que les premières pages se sont tournées toutes seules, avec une aisance déconcertante ! Nous étions face à un page-turner intenable où il se passe toujours quelque chose. Cependant, j’estime que l’on aurait pu aller plus vite durant certains passages. En effet, j’ai ressenti quelques longueurs en fin d’ouvrage ainsi que des répétitions dues aux nombreuses scènes de coucherie/rejet. Attention, futur lecteur, si tu te lances dans « Ce que tu as fait de moi », car il te faudra avoir l’estomac bien accroché ! L’auteure n’épargne pas ses personnages et n’hésite pas à énumérer chaque geste ou pensée ignoble du tandem. D’ailleurs, je comprends les critiques disant que l’on fait l’apologie du viol. C’est une idée qui m’a traversée, notamment durant la première soirée… Que ce soit dans la fiction ou dans la réalité, j’ai du mal à accepter le fait qu’on puisse aimer quelqu’un après avoir été forcé à coucher avec lui. Cela dit, j’ai surtout l’impression que Karine Giebel cherche à faire réagir et ne veut pas laisser son lecteur de marbre… En outre, j’ai eu quelques regrets concernant le dénouement que j’ai estimé trop vite expédié ! C’est dommage.

Pour résumer, ce thriller psychologique dérangeant, ambigu, sombre et cruel s’est révélé particulièrement horrible, mais addictif. L’auteure est réellement allée au bout des choses pour exploiter sa thématique de l’emprise et de la passion irrationnelle, peu conventionnelle, toxique, sans règles ni limites. Le résultat divise ! (La preuve avec mes binômes de lecture !) Reste à voir si vous êtes capables ou non d’affronter l’horreur humaine que vont vous narrer les deux accusés…

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—> Avis de Sylvie et de Siabelle 

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Citations

Je lui ai dit que je l’aimais.
Je ne mentais pas.
J’aimais deux femmes, d’un amour différent.
L’un était rassurant ; l’autre violent, effrayant.
L’un était vital ; l’autre létal.
J’aimais deux femmes.
L’une était une drogue douce ; l’autre une drogue dure.
L’une était ma vie.
L’autre serait ma mort.

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On idéalise toujours ce que l’on n’a plus ou ce que l’on ne peut pas avoir.

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L’amour est un mystère, un dictateur sans merci qui impose sa loi et lève des armées d’esclaves.

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On se croit solide et fort, on se croit à l’abri. On suit un chemin jalonné de repères, pavé de souvenirs et de projets. On aperçoit bien le ravin sans fond qui borde notre route, mais on pourrait jurer que jamais on n’y tombera. Pourtant, il suffit d’un seul faut pas, d’une seule embardée. Ensuite, c’est la chute. L’interminable chute.

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Ma note

4/5

13 réflexions au sujet de « « Ce que tu as fait de moi » de Karine Giebel »

  1. Moi qui ai complètement adhéré à la majorité des autres romans de l’auteure, je n’ai pas réussi à apprécier celui-ci. C’est toujours bien écrit, Karine Giebel est très douée pour créer une ambiance sombre et pour approfondir la psychologie de ses personnages. Mais j’ai été un peu trop mal à l’aise, comme si l’auteure approuvait finalement cette relation comme un amour déchirant certes, mais passionnel alors que je ne l’ai trouvé tout simplement toxique et destructeur. C’est surtout le ressenti final des policiers qui interrogent nos deux personnages qui m’a interpelée : le fait qu’ils envient presque cette relation qu’ils ne connaîtront peut-être jamais. C’était une lecture très dérangeante, et j’ai trouvé que ça manquait pas mal de rythme aussi.

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    1. Complètement dérangeant, effectivement ! Je n’étais pas à l’aise non plus malgré le côté addictif.
      Tu as raison pour le rythme : il y avait des longueurs ! C’est dommage…
      Je n’avais pas perçu cette envie de vivre cette relation malsaine, mais j’avais ressenti leur fascination morbide…

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