Science Fiction·Young adult

« La maison des reflets » de Camille Brissot

emilie Un avis de Saiwhisper

Titre : « La maison des reflets »
Auteur : Camille Brissot
Genre : Roman young adult / Science-Fiction
Éditeur : Syros

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résumé du livre

Depuis 2022, les Maisons de départ ressuscitent les morts grâce à des reflets en quatre dimensions qui reproduisent à la perfection le physique, le caractère, et le petit je-ne-sais-quoi qui appartient à chacun. Les visiteurs affluent dans les salons et le parc du manoir Edelweiss, la plus célèbre des Maisons de départ, pour passer du temps avec ceux qu’ils aimaient. Daniel a grandi entre ces murs, ses meilleurs amis sont des reflets. Jusqu’à ce qu’il rencontre Violette, une fille imprévisible et lumineuse… Bien vivante.

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Ma critique

Sans que j’en ai conscience, j’ai réalisé que mes dernières lectures piochées dans ma PAL ont toutes un point commun : elles traitent de la Mort et du deuil. « La maison des reflets » ne fait pas exception ! On est même complètement dans le thème, puisque l’on va découvrir une société où il est possible de créer des reflets de personnes décédées afin d’atténuer la transition entre la mort et l’acceptation. Ces reflets sont une sorte d’hologrammes très performants : ils reprennent exactement le physique des défunts, leur personnalité, leurs tics et leurs habitudes. On a vraiment une copie conforme au mort ! Cependant, ces clones sont immatériels et ne peuvent être touchés. De plus, ils ne constituent qu’un mirage pour les proches de la personne qui est partie. Le temps passe et ce spectre ne grandira pas et n’aura pas de vie. C’est comme s’il avait été figé dans le temps, juste avant sa mort. Sur un adulte, cela ne se voit pas trop, mais qu’en est-il des enfants ou des ados qui, comme Peter Pan ou des vampires à la vie éternelle, resteront toujours dans ce corps miniature ? J’ai trouvé l’idée de reflets complètement incroyable, singulière, déroutante et un peu malsaine. Camille Brissot va développer le sujet à merveille en présentant de doux arguments pour et d’autres contre ce système. couv14519093Certaines scènes sont réellement poignantes, notamment lorsque Daniel, le héros, va réaliser toute l’étendue de cet univers. La symbolique du passage à l’âge adulte et l’acceptation de la mort sont bien traitées. Pour ma part, j’ai été très émue par l’une des révélations finales le concernant

La narration va principalement suivre Daniel, un jeune homme qui a toujours vécu dans cette maison des reflets. Son père est le directeur de l’établissement : il créé lui-même chaque reflet et leur (re)donne vie à sa manière… Hélas, ce travail se fait au profit d’une vie de famille, si bien que le pauvre Daniel n’a jamais eu une vie normale. En effet, en plus de n’être jamais sorti de la maison, il vit seul, avec des amis reflets et Mme Elia, la gouvernante. Il voit de temps en temps son père qui fait plutôt acte de présence lorsqu’il n’a pas oublié que c’était l’heure du repas… Il n’y a plus de communication entre eux et, la plupart du temps, ce sont plutôt des mensonges… Ce géniteur vit dans le travail et n’a que ça en tête. Évidemment, lorsque l’on n’a que quinze ans, que l’on est livré à nous-mêmes, que l’on n’a qu’un père absent comme personne réelle et que l’on n’a jamais mis le pied dehors, on a envie d’autre chose. Il y a de quoi craquer ! C’est réellement une vie illusoire que je n’aurais pas voulu vivre. Une vie où la mort n’existe plus, où le temps semble s’être arrêté et où la peine est comme révolue… On ne peut que comprendre ce jeune adolescent qui a toujours été protégé dans une tour d’ivoire et qui rêve d’autre chose que son quotidien dénué de sens. Daniel est un personnage simple, attachant, un peu ingénu, ni trop rebelle ni trop sage, plutôt sensible et assez franc. Sa personnalité m’a beaucoup plu, car elle est assez crédible. On n’a pas un jeune homme sûr de lui, tout-puissant, beau et doué. On a simplement un jeune homme simple, complètement perdu et qui va prendre un tournant radical dans sa vie. Ce changement, il va le vivre en faisant le mur : il va se rendre dans une fête foraine afin de s’inspirer des lieux pour dessiner un fonds/une réalité virtuelle pour la maison des reflets. Là, il va rencontrer Esther et Violette, deux jumelles que tout oppose physiquement… Et, évidemment, il va tomber amoureux…

Les émotions retranscrites par l’auteure ne sont pas niaises ou trop lourdes. Camille Brissot amène les émotions avec douceur, poésie, sensibilité, réalisme et simplicité. On comprend parfaitement que Daniel tombe aussitôt amoureux de cette jolie jeune fille, car il n’a jamais connu d’enfants de son âge. Ajoutons à cela que l’inconnu a un certain charme et que cette relation a un goût d’interdit et de nouveauté… Ensemble, ils vont échanger des lettres afin de faire connaissance. Leur relation est pleine de tendresse et de promesses qui m’a rappelé les deux tourtereaux de « La tristesse de l’éléphant », car le contexte est plus ou moins le même (milieu de forains, relation surtout épistolaire, relation à distance). Alors, non, il ne se passe pas grand chose dans ce récit que ce soit au niveau de la romance ou de la maison des reflets, mais il est très fort émotionnellement. L’auteure opte plutôt pour une intrigue psychologique, une évolution des personnages secondaires et du héros ainsi qu’une réflexion sur le deuil et de la mort dans la société. Même si le rythme lent ne plaira pas à tout le monde, j’ai trouvé cet ouvrage vraiment réussi ! Mine de rien, l’histoire fait réfléchir tout en divertissant le lecteur… À découvrir !…

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Citations

Face à un deuil, on est toujours seul, il me semble. C’est un gouffre qui se creuse en nous, et personne ne peut en imaginer la profondeur car il faudrait oser s’en approcher, se pencher au-dessus du vide, perdre soi-même une partie de son équilibre. Et tout ça pour quoi ? Pour découvrir l’épaisseur du chagrin qui se cache au fond et réaliser que la petite flamme que l’on a apporté s’y noiera aussitôt.

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C’est ça, la réalité, Daniel. Les illusions mais aussi les désillusions.

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Vous n’avez jamais assisté à de véritables funérailles, Daniel. La moitié des gens y pleurent le disparu, tandis que les autres pleurent la douleur des premiers.

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Ma note

♥  4,5/5

13 réflexions au sujet de « « La maison des reflets » de Camille Brissot »

  1. Je n’ai pas encore craqué, mais ce roman me tente beaucoup.
    Le traitement du deuil et de la mort n’est pas forcément simple et j’aime la manière dont l’auteure semble l’avoir fait. Et puis, tu as dit les mots magiques qui me font toujours craquer : « l’histoire fait réfléchir tout en divertissant ».
    Merci pour cette belle chronique 🙂

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